lundi 27 octobre 2014

Sujet du Merc. 19/10 : Les café philo : à quoi bon ?



″LES CAFÉS PHILO : À QUOI BON ?″
> Mercredi 29 octobre 2014


Chaque mercredi, nous sommes 10, 20, 30 - peut-être 50, parfois - à nous rassembler au « Dôme », autour d’un thème. Autour d’un verre, aussi.
Montpellier, longtemps affublée du sobriquet de « surdouée », Montpellier, huitième ville de France par sa population, compte 265 000 habitants.
La communauté d’agglomération 430 000 et l’aire urbaine a dépassé les 560 000.
Le ratio, entre les données démographiques et la fréquentation du Café Philo est édifiant.
J’imagine que ces chiffres valent pour l’ensemble du territoire.


d’Alcoolique à Zététique
Si le nombre n’y est pas, quid du public présent ?
Alcoolique, dépressif, paumé, étudiant, érudit, professeur, chercheur, autodidacte, mégalo, militant ou frustré : les individualités sont multiples… et tout le monde a le droit de prendre la parole, puisque tout le monde a le droit de « philosopher ».
J’en entends déjà certains s’égosiller et le proclamer haut et fort : « génial, c’est véritablement cela, la démocratie ! ».
Ce qui n’est pas - totalement - faux.


Un principe généreux
Pour autant, confronté à ce satané véhicule qui refuse obstinément de démarrer, comment procédez-vous ? Un appel au garagiste… ou le premier quidam rencontré dans la rue fera l’affaire pour effectuer la réparation miraculeuse ?
Et pour se procurer baguette de pain et croissants chauds, sacrés le dimanche matin, c’est direction le boulanger… ou vous tentez votre chance chez le cordonnier ?
Pas sûr que ce dernier soit également le plus à même de résoudre vos problèmes informatiques…
Et pourtant, tout le monde serait en mesure de philosopher… alors qu’une minorité seulement a eu accès à une misérable année d’initiation. Souvenez-vous : c’était en terminale !
Alors, fatalement, on se pose des questions sur la pertinence des uns et sur les mobiles des autres.


Une réalité multiple
Pourquoi sommes-nous réunis ici, ce soir ?

- Pour satisfaire notre curiosité et notre insatiable envie d’apprendre ?
- Pour proposer des solutions ou, tout du moins, des hypothèses de travail, à des difficultés personnelles ou sociétales et confronter leur bien-fondé à des contradicteurs ?
- Pour contester des faits sociaux et politiques… mais uniquement entre « les quatre murs du Dôme » ?
- Pour contempler le réel qui nous entoure et dont nous faisons partie ; un réel dans lequel on accepte de n’être qu’un élément, sans pouvoir décisionnaire ?
- Pour nous affirmer et prendre confiance en affichant nos connaissances, nos auteurs fétiches, nos points de vue, nos revendications sociales et politiques ?
- Pour flatter notre égo en prenant la parole et en détaillant nos brillantes théories à un public que l’on croit en émoi… et momentanément mettre sous le tapis toute notre frustration?
- Pour trouver un éclairage, une perspective, un angle qui pourrait nous aider dans un quotidien devenu encombrant ?
- Pour passer un bon moment… et le partager avec autrui, ces semblables qui, deux heures par semaine, font l’effort de lâcher leur télécommande afin de se sentir vivants ?

Est-ce que « cela » suffit ?


L’effet « Bison Futé »
Oui, nous passons un « bon moment » dans ce Café Philo. C’est vrai.
La belle affaire !
Il en va de même lorsque je mange des mets savoureux, que je visionne ce film plein d’intelligence, que j’assiste à un concert mené tambour battant ou que je fais l’amour avec la créature de mes rêves (elle existe : je l’ai trouvée !).
N’y a-t-il donc pas « autre chose » ?

Le temps où Socrate « accouchait les âmes » en place publique est bien lointain et pour nous, la Philosophie se trouve désormais confinée au sein d’un « Dôme », sous un toit et entre quatre murs. Bien hermétiques, puisque la porte est consciencieusement fermée par nos hôtes avant le début de chaque « séance ». Comme pour bien nous isoler du reste de la population. Comme si nous étions des survivants. Comme s’il ne nous restait que « cela ».
D’ailleurs, qui nous écoute, hormis les 10, 20, 30 ou 50 personnes présentes ? Avons-nous un quelconque impact vis-à-vis de nos représentants politiques ? L’intelligentsia locale se soucie-t-elle de nos réflexions ? Quelqu’un se fait-il l’écho de notre existence ?

Si l’audience du Café Philo est modeste, elle n’est pas pour autant versatile. 18 ans d’âge, bientôt 1000 sujets abordés et, forcément, des milliers de gens affectés.
Les phénomènes de mode génèrent bien souvent des retombées économiques colossales, « rassemblent » nombre de nos congénères, mais ils ne durent généralement que quelques mois. Parfois quelques années, lorsque la communication est bien orchestrée.
Alors, où placer le curseur ?

Si le Café Philo donnera bientôt le jour à son 1000ème exposé, pourrait-il continuer à exister si un millier de personnes s’y réunissait chaque mercredi ?
À la manière de « Bison Futé », centre national d’information routière dont les conseils en termes de flux de circulation continuent d’inonder les médias (alors qu’ils ne fonctionnent évidemment pas, sans quoi le public, subjugué et conquis, décalerait infailliblement son heure de départ en fonction des dites prévisions… ce qui provoquerait d’inévitables embouteillages au moment où le trafic serait censé être fluide), la faible audience du Café Philo serait-elle la condition sine qua non de son existence ?
Bref : le Café Philo, est-ce que ça marche… parce que ça ne marche pas ?


Une inutilité indispensable
Le fait de ne « rien » produire est finalement ce qui fait toute la force du Café Philo. Rien n’est monnayable, négociable ou même vendable. Les « maîtres de cérémonie du mercredi » ne sont-ils pas, eux-mêmes, bénévoles ? Tout le monde peut donc parler de ce qu’il souhaite, comme il le souhaite. Le tout sans être interrompu. Un espace rare, un moment précieux.
Cette « liberté », c’est aussi ce qui délimite le Café Philo et marque ses frontières : la sphère au-delà de laquelle il n’existe plus et ne sert à rien. Le plafond qui le rend totalement invisible aux yeux de certains.
Cette « nature » est constitutive de son être et « l’inutilité » en est l’une des caractéristiques essentielles. Comme pour l’art.
Le Café Philo, c’est le lieu de tous les possibles. Génial ou médiocre, c’est selon. Les thèmes, les intervenants ou bien l’humeur du jour : il faut être là au bon moment. Il est imparfait… mais tellement humain ! Il se suffit à lui-même, mais libre ensuite aux auditeurs et participants du Café Philo d’étudier, de faire de la recherche, d’écrire, de créer, de s’investir, de s’engager ou de militer dans le domaine de leur choix. Mais cela n’aura plus rien à voir avec le Café Philo, qui n’aura été - en tel cas - qu’un préalable. Une sorte de préliminaire à « autre chose ».
Ce qui n’est déjà pas si mal.

 ++++
Contact : cafe-philo >@< cafes-philo.com   (sans le <<, bien entendu !!

mardi 21 octobre 2014

Mac Carthy à la place vendôme. Par Henry Wotton

Elle a défrayé la chronique et fait chanter les méchants et les gentils, (pour reproduire la classification bête et absurde des médias). Elle est venue, elle a été vue, elle a été vaincue. La sculpture de Paul McCarthy aura bien fait parler d’elle, pas assez peut-être, pour finalement subir les affres de la population, visiblement déconcertée par ce que certains appellent de « l’art ». Mais qu’en est-il réellement ? Le « Tree » n’est peut-être que la face cachée de la Lune, révélateur de l’art contemporain comme médium de la société néolibérale.
Paul McCarthy a appelé innocemment son œuvre « Tree », une simple recherche Internet sur Google aurait permis à l’internaute un peu avisé de connaître la variété des œuvres de l’auteur, beaucoup moins végétale.
Ainsi pouvait-on trouver un magnifique étron géant, gonflé et posé en plein Hong Kong, dont la signification échappe encore à votre humble serviteur.
Dans un tout autre domaine, aussi subtil et odorant : Georges Bush en train de faire subir des sévices sexuels à un cochon, mais également un enfant encouragé pour son père à pratiquer la zoophilie avec une chèvre.
Ou encore, dans un registre encore plus scandaleux, un enfant aux mains d’un monstre mi-chose mi-homme, à moitié nu… bref, la banalisation de la pédophilie. Cette variété artistique laisse tout de même songeur.
On ne peut qu’être ébahi par la somptuosité de cette pléiade de chefs d’œuvres. Paul McCarthy serait-il le nouveau Rodin ? S’il en a la barbe, il n’en a ni le talent, ni la grâce.
Dès lors, quand la presse parisienne s’empresse de clamer « c’est un «arbre de Noël » (en plein mois d’octobre, c’est bien connu), ou bien encore un « cyprès », il y a comme un rictus qui envahit le lecteur, auditeur ou téléspectateur un peu curieux : de qui se moque-t-on ? Si la vertu de la chose est assurément de briser des dogmes sexuels, au moins pourrait-on le dire. Mais peut-être a-t-on peur de la contestation populaire ?

Le contemporain n’existe qu’en raison de l’art classique

Quand on y réfléchit bien, les « œuvres » contemporaines n’existent en France que parce qu’elles sont exposées dans des lieux chargés d’histoire, de vécu et de majesté. Dernier exemple en date : le « Tree », savamment déposé comme un cheveu dans la soupe, Place Vendôme.
Et c’est à ce moment précis que nous sommes en mesure de rendre compte de la perversité de l’ « art » contemporain. Comprenons bien que ces œuvres, placées au beau milieu des Halles de Paris ou de Saint-Denis, n’auraient pas le même effet sur le spectateur. Le « Tree » n’exista en fait que parce qu’il fut placé Place Vendôme, symbole du luxe, de la Majesté, et de l’excellence architecturale française. Aux yeux ébahis des touristes de découvrir le furoncle qui dévisagea Paris. Nier ainsi l’histoire.
Les statistiques sont incontestables : avec 9,33 millions de visiteurs en 2013, le musée du Louvre reste celui qui attire le plus de visiteurs au monde. Et ce n’est pas pour admirer le dernier tas de terre déposé dans un intérieur immaculé que les touristes du monde entier se pressent de venir chez nous, mais bien pour admirer la Joconde ou les vases grecs antiques. La France bénéficie encore de la réputation de l’excellence culturelle qu’il serait utile, préférable votre vitale de conserver. Et ce n’est pas en gonflant un jouet à la mode que l’on va y parvenir.
Il convient de s’interroger sur la pertinence de telles dépenses publiques, quand on sait que Notre-Dame de Paris souffre d’un manque de financement, que certains ponts sont en décrépitude, et que l’on rase des quartiers historiques entiers, pour cause de vétusté. Voudrait-on détruire mille ans d’histoire de France ?

Culturez-vous !

Mais votre serviteur avait oublié de préciser qu’il venait de province, et qu’en bon inculte, il lui était impossible de comprendre les subtilités de l’ « art » contemporain.
Quelle différence, comme l’écrivait dernièrement Luc Ferry, entre un « authentique Soulages et un lambris de Castorama », si ce n’est le nombre de zéros sur l’étiquette des prix et la soumission du lambris à la TVA ? N’en déplaise à certains, il est difficile pour nous d’avoir la moindre admiration pour ces œuvres. Peut-être une affaire de goût ? Pourtant, on reste perplexe devant cette soi-disant créativité et ce, dans tous les domaines.
Pour avoir vu des pièces de Shakespeare « made in  2014 » il est difficile de comprendre pourquoi Roméo tire sur son ennemi juré avec un revolver, vêtu d’un jean et d’un blouson en cuir, le tout chaussé par de magnifiques Nike bicolores. De même concernant les mises en scène modernes de Racine ou de Corneille : pourquoi des cubes et des épées suspendues au plafond ? On a le sentiment que pour faire artistique, il faut faire extravagant, il faut faire étrange : faut-il faire laid pour exister ?
Et loué soit le jour où fut mis en scène le  Roi Lear (Shakespeare) avec des costumes d’époque, des décors d’époque, ce fut une exception de grâce dans le tumulte du bizarre.
Un artiste, généralement, crée pour la postérité, non pour l’excentricité.

L’art contemporain, medium de la société néolibérale

Aujourd’hui, n’importe qui a le droit de se définir comme un artiste, c’est la désignation qui compte. De même, n’importe qui peut écrire un livre, ou encore se définir comme philosophe. Le propre de l’artiste n’est plus de « créer par son génie », comme l’aurait défini Emmanuel Kant, mais bien désormais d’avoir du génie parce qu’il a créé : ce n’est plus le processus qui est mis en valeur, mais l’objet, devenu œuvre d’art car défini comme tel, et reflet de la marchandisation de la culture.
Quand les livres de Musso ou de Lévy se vendent comme le dernier jeu vidéo à la mode ; quand on érige en référence littéraire Cinquante Nuances de Gris, on se demande si le marché et sa logique n’ont pas réellement fini par primer sur la création culturelle, que le nivellement par le bas occasionné par l’utilitarisme du marché a triomphé. Pour faire simple : que la société individualiste néolibérale est devenue reine.
L’ « art » contemporain est un « art neutre », si l’on s’en réfère aux orientations de la politique culturelle américaine post-1945. Selon Clement Greenberg, théoricien de l’Action Painting, il fallait imposer une hégémonie culturelle pour mieux imposer la domination économique des États-Unis. On venait donc d’inventer une mesure pernicieuse du « Soft Power ».
L’art contemporain a pour fonction principale de véhiculer les valeurs du néolibéralisme : en pratiquant un élitisme non plus culturel (à savoir la connaissance pratique des œuvres) mais bien un élitisme social, de compte en banque, la culture (Bildung en allemand, soit le savoir) est devenue la Kultur (Culture au sens de civilisation, toujours en allemand). Cette Kultur revêt le manteau de la civilisation, en le sens où il ne s’agit plus de critiquer l’œuvre d’un artiste, mais le vernis culturel qui la recouvre : on critiquera plus en réalité l’hégémonie culturelle, l’uniformité et l’étrange ressemblance des nouvelles œuvres, que les œuvres en elles-mêmes.
L’accessibilité universelle a accentué cette logique néolibérale : découvrir les œuvres sur Internet ou dans des revues a rendu cette Kultur apparemment universelle, alors qu’il n’en est rien. C’est désormais plus la possession de l’œuvre qui lui confère un statut d’œuvre d’art. Le fait que l’on achète un tableau blanc, avec un point rouge au milieu, peut paraître invraisemblable. Mais comprenons que si nous le faisions nous-même, nous n’aurions pas la symbolique de l’achat derrière : le prix fait l’œuvre d’art. Autrement dit, le marché lui confère son statut. L’offre, comme dirait Say, crée, peut-être, ainsi sa propre demande.
Et contrairement à ce que l’on pense, l’ « art » contemporain est loin d’être l’héritier de l’art moderne. La société néolibérale cherche le tout conforme, elle cherche le lisse, comme l’entrepreneur cherche la rationalisation de sa production et met en branle la chaîne de production. Elle cherche en vérité ce qui est radicalement différent, tout en étant clone. Le contenu ne change pas, la forme très peu, mais la symbolique varie toujours.
L’art moderne, que l’on pourrait (grossièrement) réduire aux courants « Art Nouveau » et « Art Déco », se caractérisait bien au contraire par le rejet des carcans et du classicisme. Leur formidable créativité se trouvait bien dans le primat de la pratique sur le primat de l’objet fini : ce qui compte, c’est la création, non l’œuvre ; c’est l’invention d’un système, et non l’objet en lui-même: ainsi naquirent des courants où tous les domaines de l’art étaient approchés (architecture, sculpture, peinture etc.), pensés, comme si les maîtres Majorelle ou Auguste Perret avaient projeté une vision systémique de la société. Le nouvel art, quant à lui, n’approche pas le monde ni la vie, il ne porte aucune critique à leur égard, mais les conforte et les confirmes. Le Nouvel Art, c’est Queteris Paribus : on change les œuvres, mais le monde autour ne change pas. Cet art n’influe pas sur la société. Il institue cette même société du « moi », alors qu’il aurait tant à lui reprocher.
Ainsi, la production formaliste n’est pas engagée à transformer la réalité, mais à la reproduire, tout en faisant croire qu’elle la transforme. Elle ne peut donc jouer que par la surenchère : un peu à l’image d’une bulle qui grossit de l’intérieur, comme spéculative. Et pour exister dans l’univers médiatique, il faut une violence, une forme de choc émotionnel, devenu critère de la « créativité » et par conséquent de la valeur artistique. C’est ainsi que l’on paiera des milliers d’euro un étron gonflable en plein Hong Kong. Que l’on n’hésitera pas à aller vers l’obscène, l’amoral, au nom de l’art et de la culture, pour mieux satisfaire les exigences d’un marché devenu gaster.
La vocation première du Nouvel Art Mondial, incarné ici par McCarthy, est donc d’anesthésier affectivement l’individu le plus faible d’esprit (et par conséquent le plus vulnérable). Montrer la zoophilie ou la pédophilie au nom de l’art, n’est qu’une manière de promouvoir un nouvel opium du peuple, comme pour anesthésier l’inculte population qui n’apprend plus à reconnaître les tableaux du Caravage, ni à les analyser.

Non ! Cette culture est réservée à une élite sociale que l’on qualifiera par la suite d’illuminée. Mieux vaut l’idéologie de la Kultur, beaucoup accessible pour la masse, et par conséquent beaucoup plus intrusive.
Ce dernier permet ainsi à l’idéologie mondialisée de pénétrer le petit consommateur, qui de manière inconsciente, n’hésitera pas à cautionner la société où lui et ses semblables, sont atomisés. La société néolibérale, est sans doute le totalitarisme du XXIème siècle.

Henry Wotton

http://lenouveaucenacle.fr/pluggate-la-societe-neoliberale-contestee 

lundi 20 octobre 2014

Sujet du Merc. 22/10 : Un monde sans propriété privée mais avec une propriété d'usage, est-ce possible ?



Un monde sans propriété privée mais avec une propriété d'usage, est-ce possible ?

(Extrait d’un texte sur l’Internet de Denis PETER, dans « Humanisme Pur »)



Pourquoi faut-il abolir la propriété privée :



Propriété privée : Pouvoir autocratique d'un individu, modifiable par lui-seul, sur tout ce qui concerne la destination d'un bien.



La propriété privée ne doit donc pas être confondue avec un droit de jouissance exclusive qui serait accordé par la collectivité sous une condition ou pour un temps donnés.



De plus, ce droit est parfois atténué par des règlements motivés par l'intérêt général.



Quand nous parlons ici d'abolition de la propriété privée, nous ne prônons pas sa suppression immédiate dans n'importe quelle circonstance. Nous ne prônons pas l'expulsion des propriétaires, la confiscation des biens !



Nous n'émettons pas de jugement moral : la propriété n'est pas "mal "… Nous disons juste qu'elle est inconcevable dans une économie qui se voudrait durablement juste, solidaire et écologique, et nous le démontrons.



Il est souhaitable de concevoir une telle économie puis de la mettre en œuvre en partant de la situation actuelle. Cela nécessite de s'extirper de certains conditionnements (voir les idées reçues énumérées ci-dessous), et, pour ce faire, de penser rationnellement…



Quelques idées reçues :



Avant d'expliquer en quoi la propriété privée doit être éradiquée d'une économie qui se voudrait soit juste, soit démocratique, soit fraternelle, soit écologique (et à fortiori, les quatre à la fois !)



Examinons un peu les arguments habituellement avancés pour la justifier.



1  Sans propriété privé, c'est le communisme, et ça n'a pas marché…



2  La propriété privée est nécessaire à la liberté et à l'autonomie individuelle…



3  Le besoin de propriété privée est dans la nature humaine…



4  Sans propriété privée, il n'y a pas de motivation pour travailler…



5  Sans propriété privée, les gens ne prennent pas soin des biens et se déresponsabilisent…







1 Sans propriété privé, c'est le communisme, et ça n'a pas marché…



Cet argument est un sophisme grotesque.



Le terme communisme a deux sens, ce qui ne manque pas d'induire en erreur par amalgame. Il désigne une économie sans propriété privée (par exemple, le mode de vie tribal), mais aussi certains socialismes d'Etat inspirés des théories marxistes. Or, l'argument 1 part du premier sens, et conclut en utilisant le second…



Même en supposant que seul le premier sens est utilisé, il est évident que l'on ne peut pas dire que le communisme n'a pas marché. Quand bien même aucun communisme viable n'auraient été expérimenté, on ne pourrait en déduire qu'aucun n'est viable, puisque seule une infime proportion de ces possibles a été testée. L'échec d'un communisme n'est pas généralisable à l'ensemble. Bien que parfaitement inepte, ce raisonnement est tellement ressassé, qu'il devient un réflexe trompant un grand nombre de gens.



2 La propriété privée est nécessaire à la liberté et à l'autonomie individuelle…



Il est évident que le propriétaire d'un bien est libre d'en faire plus de choses, que celui qui n'en est pas propriétaire. La propriété introduit donc une inégalité entre les libertés. Les plus riches sont plus libres que les plus pauvres. L'augmentation de liberté conférée à celui auquel on attribue la propriété d'un bien se traduit par une diminution de la liberté des autres (plus nombreux...) Si la propriété était collective, tout le monde aurait une liberté plus importante par rapport à l'utilisation du bien. Privatiser un bien revient à réduire à zéro (ou presque) la liberté de l'utiliser pour tous les citoyens sauf un…



L'illusion de cet argument vient de ce que l'on a tendance à se placer dans la peau du propriétaire du bien, en oubliant la privation de liberté induite pour les non-propriétaires… Si l'on fait l'inverse, la propriété est bien plutôt une privation de liberté et d'autonomie individuelle. On oublie souvent d'envisager le nombre considérable de biens dont on pourrait enfin jouir, si la possession était abolie… Il est clair que globalement, ce serait une sacrée augmentation de liberté individuelle !



L'abolition de la propriété privée est souvent fantasmée comme la perte de toute intimité et autonomie, n'importe qui pouvant venir prendre les affaires que j'utilise, ou pénétrer dans mon habitation. Or, l'abolition de la propriété privée n'empêche pas la possibilité de jouir de façon exclusive d'un bien : il suffit de le louer à la collectivité… ou qu'il soit ainsi attribué par décision collective… de façon à assurer ladite "intimité" ou "autonomie". Il ne faut évidemment pas confondre communisme avec promiscuité ou absence de règles.



3 le besoin de propriété privée est dans la nature humaine…



Le concept de nature humaine est évidemment discutable. Le comportement d'un être humain dépend pour une bonne part de conditionnements hérités de sa culture et de son mode de vie. Or, aujourd'hui, la culture et le mode de vie sont fortement influencés par la propriété privée…



On peut cependant considérer qu'il existe certaines tendances innées chez l'homme, qui pourraient donc constituer une sorte de « nature humaine ». Ces dernières sont nécessairement héritées du mode de vie de nos ancêtres sur des périodes de temps supérieures au million d'années. Le mode de vie de ces derniers était un communisme (pas de propriété privée de la terre et des moyens de production au sein de la tribu)… C'est donc plutôt les tendances sociales favorisant le communisme qui sont vraisemblablement inscrites dans la « nature humaine »… Elles expliquent d'ailleurs fort bien le sens de la justice, de la solidarité etc. et aucunement un besoin de propriété privée…



Mais les idées reçues ont la vie dure...



4 Sans propriété privée, il n'y a pas de motivation pour travailler…



On peut fort bien imaginer un communisme où, pour pouvoir consommer, il faille travailler (cela semble d'ailleurs être une option " réaliste ")... Donc, même en se limitant à des motivations strictement égoïstes, on voit bien qu'il peut y avoir une forte motivation à travailler, même en l'absence de propriété privée !



5 Sans propriété privée, les gens ne prennent pas soin des biens, ils ne se sentent pas responsables…



Même d'un point de vue strictement égoïste, on peut imaginer un système socialiste où les biens seraient loués avec obligation de payer pour les dégradations ou pertes.



On peut aussi imaginer une motivation non égoïste, un respect véritable de son environnement matériel et du travail d'autrui, et non pas uniquement de soi-même... Une telle motivation n'est évidemment pas dominante dans un système basé sur la propriété privée et la compétition, lequel entretient plutôt l'égoïsme… Il y a là un cercle vicieux…

Contact mail : cafe-philo<@>cafes-philo.com    (retire les <>   !! merci)




Yves Cusset à Montpellier - Du 22/10 au 26/10.



Petit Manuel d'Engagement politique à l'usage des mammifères doués de raison et autres hominidés un peu moins doués

de Yves Cusset, mis en scène par Yves Cusset
Le café philo recommande vivement ce spectacle. Nous avons eu l'occasion d'apprécier son travail lors de ses passages  à Montpellier.

Né en 1972, Yves Cusset a suivi une formation classique en philosophie en passant par l’Ecole Normale Supérieure, l’agrégation et le doctorat. Aujourd’hui professeur en IUFM (à Besançon de 2005 à 2007 puis à Créteil) et à Sciences-Po Paris, il s’est spécialisé dans la philosophie politique (il a notamment publié "Habermas, l’espoir de la discussion", éd. Michalon 2001, "Philosophies politiques pour notre temps"(avec J.Picq), Odile Jacob 2005). Mais c’est surtout sa double expérience d’enseignant en lycée et de comédien qui lui a fait découvrir le pouvoir qu’a la scène de faire partager sous une forme charnelle l’expérience de l’étonnement philosophique, retrouvant en particulier dans le rire la pensée du corps. Il s’essaye donc aujourd’hui à un genre nouveau : le solo philosophique juste pour rire ("Le remplaçant" et "Rien ne sert d’exister" ont été publiés par Le Jardin d’Essai en 2005), qu’a prolongé un Abécédaire philosophique « juste pour rire », et explore au-delà les possibilités qu’a l’expérience théâtrale d’offrir une résonance inédite à l’interrogation philosophique, comme à travers l’adaptation croisée de textes de Sénèque et Albert Cohen intitulée "L’époque de la vie la plus délicieuse.

Un examen humoristique et désenchanté sur les catégories politiques actuelles qui, au-delà de la différence droite-gauche, dresse un véritable tableau sans concession de la société contemporaine.
Le philosophe humoriste Yves Cusset revient vous proposer sa vision, absurde et drôle, folle et tendre, entremêlée d'extravagances philosophiques, de l'engagement politique dans le monde actuel.


du   au samedi 25  :  19h
Le  : 17h30

12 euros si vous venez de la part du café philo.

17 rue Ferdinand Fabre 34000 Montpellier
Accès : 10 min. de la Comédie, Tram : Arrêts Corum ou Louis Blanc, Parking Corum

http://philopistes.blogspot.fr/

Sujet du Merc. 23/03/2024 : Le cas Nietzsche.

                                   Le cas Nietzsche.       Pourquoi un tel titre ? Qui aurait l’idée de dire « le cas Diderot », ou « le c...